Clarence le poney

Par Al Sparber

Quand ma femme avait 12 ans (c'était bien avant qu'on ne se marie) elle eut vraiment envie d'un poney. Carol supplia Papa tant et si bien qu'il finit par céder. Hmm, pensa Papa, où est-ce que je pourrais trouver un poney ?.

Il se trouva que Papa connaissait un fermier du coin possédant un petit zoo ambulant qu'il faisait tourner dans les écoles et les foires locales. Le zoo comprenait un manège de poneys (le genre de manèges ou un paquet de poneys tournent en rond attachés autour d'un axe).

Clarence avait l'air tout à fait normal

Le fermier détenait quelques poneys de plus que nécessaire et présenta à Papa un mignon petit Shetland nommé Clarence. Ce fut le coup de foudre. Papa et le fermier convinrent d'un prix et l'affaire fut emballée. Le fermier conduisit Clarence de l'enclos à une remorque que Papa avait acheté le jour même. Clarence était un bel animal, amical au possible. Il avait l'air aussi normal qu'un poney peut l'être.

La maison familiale de Carol repose sur un terrain luxuriant de 14 hectares et Papa put facilement arriver jusqu'à derrière la grange sans se faire remarquer. Il conduisit Clarence dans une stalle, le brossa, le nourrit, et le sella. Puis il fit marcher Clarence jusque devant la maison, et appela tout le monde dehors. Pour Carol, son frère Tom et sa sœur Linda, la surprise fut totale. Les enfant, voici Clarence dit Papa. La première ballade fut pour Carol. Clarence avait juste la bonne taille et il était mignon tout plein.

Le terrain devant la maison est un grand pré de presque 1 hectare. Carol était assise sur Clarence, qui faisait face à l'autre bout de la prairie.

Le poney n'a-qu'un-tour

Ma future femme ne se tenait plus de joie en donnant à Clarence son premier coup de talons accompagné d'un ferme giggyup. Le petit poney s'ébroua avant de s'élancer dans un cercle parfait de 20 mètres de diamètre, dans le sens inverse des aiguilles d'une montre. Que les rênes le tirassent à droite ou à gauche, Clarence restait fidèle à son cercle. Vous voyez, après sept ans de manège pour enfants, Clarence était devenu très déterminé. Si vous le faisiez marcher simplement il était capable d'aller droit devant et de tourner à droite avec la plus grande facilité. Mais si vous mettiez un enfant sur sa selle, Clarence devenait un vrai spécialiste.

Et il prenait son cercle avec beaucoup de sérieux. Les enfants essayèrent de le mater. Ils tirèrent si fort sur les rênes que les yeux du pauvre Clarence lui sortirent un peu trop des orbites. Mais en dépit de leur efforts, Clarence continua à tourner à gauche. Il marchait vers la gauche et il pouvait même galoper vers la gauche. Mais il ne faisait rien d'autre. Les enfants tracèrent donc un cercle de 20 mètres de large et ce fut tout.

De quoi on parle, là ?

Vous vous dites On est censé traiter de web design ici. Pourquoi diable ce gars parle t-il de poneys ?

Le web designer n'a-qu'un-tour

Vous êtes dans la partie depuis deux ou trois ans, et vous pensez avoir tout compris. Un boulot arrive et vous lancez Dreamweaver. Vous y insérez votre incontournable tableau et sa navigation aux 24 rollovers découpés dans Fireworks (ou ImageReady). J'ai une info pour vous. Que vous le réalisiez ou non, vous êtes sûrement en train de tourner en rond. Les yeux fixés à gauche, vous êtes totalement inconscients de ce qui se trouve de l'autre côté. Continuez comme ça, et tout ce que vous pourrez bientôt faire c'est lever les yeux de l'ornière que vous avez creusé vers le web designer que vous auriez pu être.

Il n'y a rien de mauvais en soi à utiliser les tableaux pour maquetter une page web. Ils sont très pratiques pour un déploiement rapide de sites chez des clients devant accommoder un grand éventail de vieux navigateurs, ou pour n'importe quel site qui doit afficher des données tabulaires. Les tableaux ne sont pas maudits. Mais en terme de web design, il n'y a pas d'absolu. L'objectif se déplace en permanence... mais pas en cercles. N'utiliser que des tableaux est une aussi mauvaise idée que de ne jamais utiliser de tableaux. Ne pas se mettre à CSS, c'est un peu un lent suicide professionnel.

La conception de pages web, c'est comme la médecine. Les médecins prospères sont ceux qui se tiennent au courant des dernières techniques. Personne ne souhaite avoir recours à un docteur qui ignorerait tout de l'imagerie médicale et de la chirurgie non-intrusive. Je n'embaucherais pas un web designer que CSS les standards du W3C, l'accessibilité et l'ergonomie ne mettent pas d'humeur lyrique.

Tout est bien qui finit bien

Clarence a fini par se défaire de ses habitudes circulaires. Les enfants se sont accrochés et la vieille branche a fini par comprendre. Vous devez persévérer. Vous devez dépasser les frustrations parce que la récompense en est réellement incroyable. Le marché du Web est très particulier, à cause de son jeune âge et de la vitesse à laquelle les choses changent. À peine avez-vous maîtrisé une technique qu'une nouvelle débarque, et votre réaction naturelle est défensive. Ça peut vous déprimer voire vous miner, mais seulement si vous vous laissez submerger.

Vous venez peut-être de passer 6 mois à apprendre comment réaliser le design parfait grâce à 63 tableaux périlleusement imbriqués (nous l'avons tous fait). Vous levez les yeux, et soudain tout le monde est en train de vanter les merveilles de CSS. Vous devez faire un choix (encore un). Vous pouvez balancer dans la cour votre plus beau tableau, vous déshabiller et trotter sans fin autour de lui (c'est une image, ne reproduisez pas ceci chez vous ou au bureau), ou vous pouvez saisir l'occasion d'apprendre une extraordinaire nouvelle technique et garder ainsi une tête d'avance sur la concurrence. Le fait est qu'on ne peut jamais arrêter d'apprendre. Le jour où vous croyez savoir tout ce qu'il y a à savoir, vous êtes de train de tourner en rond.


http://www.projectseven.com/grafitti/clarence0602/index.htm

Fiche technique

À propos de l'auteur

Al Sparber est l’un des fondateurs de Project VII, un site majeur de ressources sur le développement web. Al et son équipe sont à la pointe de leur domaine, et ils ont créé quelques-unes des extensions Dreamweaver parmi les plus intéressantes.

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